MICHÈLE FEBVRE
JUIN 2011
HISTORIEN DE LA DANSE
INTRODUCTION
Bienvenue à la page Web de Dance Collection Danse, Historien de la danse du mois. Cette page Web vous présente des entrevues avec un historien canadien de la danse. Ces entrevues seront publiées tous les deux mois au courant de l’année 2011. À travers ces entrevues, nous espérons vous faire découvrir le métier d’historien de la danse et vous en dévoiler les multiples facettes. De plus, la page Web nous permet de mettre l’historien en avant-scène; celui qui est souvent caché derrière un ordinateur, ou connu seulement par ses textes. Ici, c’est l’historien lui-même que vous aurez l’occasion de connaître.
Ce mois-ci, nous vous présentons Michèle Febvre, une intellectuelle de la danse qui pratique à Montréal. Febvre insiste qu’elle n’est pas une historienne de la danse, mais qu’elle réfléchit sur celle-ci. Ses réflexions érudites sur la danse, fondées sur son expérience de danseuse et sa connaissance de la philosophie de l’art, ont grandement développé l’étude de la danse au Québec. Par exemple, ses écrits La danse au défi (1987), Danse contemporaine et théâtralité (1995), et Jean-Pierre Perreault. Regard pluriel (2001) sont visionnaires et ont introduit des questions nouvelles qui analysent des thèmes couramment explorés aujourd’hui au Canada.
Comme vous allez le constater dans l’entrevue, Febvre a joué plusieurs rôles dans le milieu de la danse ; danseuse, chercheure et enseignante. Ses expériences reflètent le développement de la pratique et l’étude de la danse moderne au Québec. Elle a donc joué un rôle complet dans ce milieu. J’espère que grâce à cette entrevue, vous serez intéressés à mieux connaître le travail de Michèle Febvre.
Bonne lecture!
Carolyne Clare
DCD Metcalf Foundation Intern
ENTRETIEN
Nom : Michèle Febvre
Employeur actuel : professeure associée au département de danse de l’UQAM
CC : Pour quelles raisons avez-vous décidé de commencer à danser?
MF : Pas de raisons en particulier, ce sont plutôt des concours de circonstances qui m’ont amenée à la danse. C’est dans le cadre de mes études à L’École Normale Supérieure d’Éducation Physique en France que j’ai découvert ce qu’on appelait alors l’expression corporelle ou la rythmique, et qui s’apparentait à la creative dance, peu de technique mais beaucoup d’improvisation. À travers ces cours, j’ai tout de suite eu un rapport créateur à la danse. Et ça a été pour moi une révélation. J’avais dix-huit ans passé, mais depuis l’enfance je courais, grimpais, bougeais, faisais des spectacles dans ma cour. Mon milieu socioculturel et le contexte d’une petite ville ouvrière se prêtaient peu à ce qu’une petite fille fasse de la danse. Par contre, adolescente j’ai fait de la gymnastique, et, dès l’âge de 13 ans et jusqu’à l’âge adulte, j’ai participé à de nombreuses compétitions en athlétisme, surtout en sprint.
CC : Quels ont été vos professeurs de danse?
MF : À l’École Normale Supérieure une de mes professeures était Monique Bertrand dont le nom de scène était Pinok. Elle était également mime professionnel. Cette femme m’a énormément marquée. J’ai d’ailleurs fait partie de son groupe de mime pendant quelques années. Parallèlement au mime, quand j’étais étudiante à Paris et après, j’ai suivi des cours avec Karine Waehner, une Allemande, qui avait été formée chez Mary Wigman et j’ai participé aussi à de nombreux stages de danse moderne et de jazz qui avaient lieu l’été au Centre américain de Paris. La plupart des professeurs venaient des Etats-Unis, de chez Martha Graham, Alwin Nikolais entre autres, mais aussi d’Europe. Donc le sport, la danse, le mime, c’est l’entraînement que j’ai reçu avant de devenir danseuse professionnelle à 28 ans à Montréal. C’est un profil atypique, mais qui peut ressembler à celui de certains danseurs de ma génération.
CC : Pour quelles raisons êtes-vous venue au Québec?
MF : J’enseignais déjà en France depuis cinq ans à de futurs professeurs d’éducation physique quand j’ai été engagée par le département d’éducation physique de l’Université Laval à Québec en 1969 pour enseigner ce qu’on appelait le « mouvement expressif », la gymnastique au sol et la gymnastique rythmique. J’y suis restée deux ans.
CC : Pour quelles raisons êtes-vous venue à Montréal?
MF : Là encore, c’est un peu un concours de circonstance. À Québec, au début des années 70, il y avait peu de moyens pour se perfectionner en danse et j’avais l’impression de stagner. J’avais donc décidé de rentrer en France quand, à l’initiative de Danielle de Bellefeuille, le département de kinanthropologie de l’UQAM m’a proposé de participer à la création d’une mineure en « mouvement expressif »- qui n’a duré que deux ans.
Montréal m’attirait parce qu’il y avait le tout nouveau Groupe Nouvelle Aire [GNA] fondé, entre autres, par Martine Époque que je connaissais depuis nos études à Paris. Martine savait que je faisais de la danse. Je l’ai contactée pour suivre ses cours. Elle m’a dit oui, et je suis donc allée suivre mon premier cours. Cela a été mon audition. J’ai passé une audition sans le savoir ! C’est comme ça que je suis rentrée au Groupe Nouvelle Aire.
CC : Est-ce que vous avez fait de la recherche académique pendant que vous dansiez pour le GNA?
MF : Oui, j’ai fait une maîtrise à l’Université de Montréal en sciences de l’éducation dans un programme qui s’appelait « expression dramatique ». Le programme n’avait rien à voir avec le théâtre, mais était centré sur une pédagogie de la créativité. Mon mémoire portait sur la mise en jeu du corps dans des ateliers pratiques à partir d’une analyse de contenu des journaux de bord que les étudiants remettaient chaque semaine. Toutes les lectures que j’ai dû faire sur le corps m’ont d’ailleurs servi par la suite pour bâtir un cours pour le programme de baccalauréat en danse.
CC : Est-ce que les autres membres du GNA s’intéressaient à l’histoire de la danse?
MF : Oui, nous étions intéressés par ce qui s’était passé avant nous et ce qui se passait autour de nous. On avait entre nous des grandes discussions autour de la danse et des arts, chez les uns et les autres, avec quelques bonnes bouteilles et beaucoup de fous rires!
Dans cet esprit de rencontre et de réflexion, le GNA, à l’initiative de Martine Époque, a mis sur pied les Choréchanges. Ça se passait dans le studio, le public était invité aux présentations et discussions. Comme on s’interrogeait sur nos prédécesseurs, on a organisé des tables rondes avec Françoise Sullivan, Jeanne Renaud, Françoise Riopelle, mais aussi Elsie Solomon, Séda Zaré, Berouty Nagis, si je me souviens bien. De là est née l’idée de reconstruire certaines de leurs danses. Françoise Sullivan, a remonté Dédale et Droit Debout une performance qu’elle avait faîte pour le Groupe de la Place Royale [GPR], Françoise Riopelle a également refait un solo des années 60 que le GNA a programmé dans un de ses spectacles. Ces activités nous ont permis de découvrir toute une histoire assez méconnue à cette époque, notamment celle du mythique Refus Global. Je pense que ça a été une sorte de coup d’envoi pour les futures recherches d’Iro Tembeck.
On a également fait venir des artistes de Vancouver, de Toronto, notamment Miriam et Lawrence Adams, Patricia Beatty, David Earle, Judy Jarvis et nombre d’autres que j’oublie. Il y a eu beaucoup d’échanges avec Toronto et notamment avec le Toronto Dance Theatre. Patricia Beatty et David Earle venaient de temps à autre enseigner à la compagnie. Merce Cunningham lui-même est venu encadrer un stage dans nos studios. Ce n’était pas le désert à Montréal ! Tout cela précède de quelques années la grande effervescence des années 80.
Dans les années 70, il n’y avait que deux groupes en danse contemporaine : le Groupe de la Place Royale (GPR) et le GNA. Nous étions presque des frères « ennemis » même si chacun allait voir les spectacles de l’autre. D’ailleurs, le premier spectacle que j’ai vu en arrivant au Canada, c’était le GPR au Palais Montcalm à Québec en 1969: Jean-Pierre Perreault et Maria Formolo y dansaient nus ! [dans le film qui accompagnait le duo sur scène, Karanas de Jeanne Renaud]. Le GPR appartenait à un certain establishment artistique et social, avec de très bons danseurs formés en général de longue date, alors qu’au GNA nous venions de partout, socialement et géographiquement. Quelques danseurs formés au classique, certains en éducation physique et sportive, d’autres en littérature, presque tous avaient une formation universitaire. Martine Époque était également diplômée de l’École Dalcroze de Genève, Iro Tembeck qui dansait depuis l’enfance venait de terminer sa maîtrise sur T.S Eliot à l’Université McGill, Paul-André Fortier était professeur de littérature, Édouard Lock, d’à peine vingt ans, étudiant en lettres à Concordia.
C’était un milieu très éclaté et éclectique, très stimulant. On partageait des connaissances variées et un niveau technique variable selon les individus… et des discussions à n’en plus finir.
CC : Pour quelles raisons avez-vous décidé de commencer des études de troisième cycle?
MF : J’étais de nouveau à l’UQAM depuis quatre ans, cette fois au Regroupement théâtre et danse. Je dansais encore, mais, blessée, je sentais que ce n’était plus pour très longtemps. Faire un doctorat était une façon de continuer dans la danse sans danser et de contribuer à ce milieu que j’adore.
Iro Tembeck et moi, en plus de certains ateliers, nous enseignions déjà les cours théoriques que nous avions créés pour le nouveau programme de baccalauréat en danse. Elle donnait les deux cours d’histoire, et moi, le cours Nature et fonction de la danse et Les théories contemporaines du corps. Je pensais qu’un doctorat me permettrait de hausser mon niveau de réflexion et de développer des cours pour l’éventuel programme de maîtrise auquel nous pensions déjà.
J’étais aussi intéressée à me développer personnellement. Personne à mon département n’exigeait que je fasse un doctorat, mais je voulais aller au-delà du connu. Et puis, passer quelque temps en France près de ma famille n’était pas non plus pour me déplaire.
En plus, je savais que je voulais travailler autour de la théâtralité en danse, ce qui me touchait directement puisque, comme danseuse, je faisais partie de cette vague de danse-théâtre qui a marqué le Québec au début des années 80. C’est toujours préférable d’aimer son sujet car on le porte longtemps !
CC : Est-ce que vous avez continué à danser durant vos études?
MF : Très peu car je suis partie à l’étranger. J’ai dansé encore sporadiquement à mon retour, en 86, pour Paul-André Fortier et, l’année de mes 50 ans, pour Louise Bédard qui avait besoin d’une « femme mûre ». Et d’autres petites choses comme ça.
CC : Vous avez fait vos études de troisième cycle en France?
MF : Oui, parce qu’au Québec, je ne savais pas où et avec qui aller. Je ne voulais pas me diriger vers l’éducation, ce n’était pas un secteur qui m’intéressait. En histoire, je n’y ai même pas pensé. Ma directrice de maîtrise, qui était aussi française, était en contact avec le philosophe Michel Bernard. Celui-ci commençait à s’intéresser à la danse et était prêt à superviser des étudiants. Je l’ai rencontré et il a accepté d’être mon directeur de thèse. J’étais inscrite à l’Institut d’études théâtrales de l’Université de Paris III, puisqu’il n’y avait pas de programme universitaire en danse en France à cette période. J’étais la seule étudiante avec un projet sur la danse. J’ai finalement terminé mon doctorat à l’Université de Paris VIII, première doctorante du premier département danse, mis sur pied d’ailleurs par mon directeur après maintes batailles avec l’institution !
CC : Quelle sorte de cours avez-vous suivi?
MF : La plupart des cours et séminaires que j’ai suivis étaient en sémiotique et en esthétique du théâtre, en analyse de spectacles avec Anne Ubersfeld, Michel Corvin et Michel Bernard. Au début, je me suis sentie comme en terre étrangère, souvent désarçonnée. Je n’avais aucune formation en linguistique, en sémiologie et les concepts venaient beaucoup de ces terrains-là. Le cours d’Ubersfeld m’a donné des outils d’analyse et le cours de Corvin, qui portait justement sur la théâtralité, m’a vraiment permis de débloquer et de raffiner ma problématique de thèse, car il se situait en amont des pratiques tout en s’appuyant sur l’actualité théâtrale. Celui de Michel Bernard, d’une complexité redoutable, aux confins de la phénoménologie des sensations et de la perception ne cesse d’alimenter encore aujourd’hui ma réflexion, à l’heure d’ailleurs du retour à la phénoménologie et des questions concernant la corporéité. C’est par lui aussi que j’ai lu les grands penseurs du moment autour de la postmodernité, de la représentation, du récit.
Les cours suivis lors de ma scolarité de 3ème cycle ont été véritablement déclencheurs pour moi et ils ont changé totalement mon regard sur la danse. À travers tout cela j’ai appris la rigueur, enfin, je l’espère. L’un des premiers commentaires de mon directeur de thèse quand j’ai commencé à parler de théâtralité:« Bien, la théâtralité, mais vous allez devoir cerner le concept ». J’étais naïve de croire aux évidences. Ce concept est toujours historicisé, né au début du 20e siècle il apparaît quand les gens de théâtre se sont interrogés sur ce qui faisait la spécificité de leur pratique et ont remis en cause la domination du texte sur le jeu et la scène. C’est ce que j’ai appelé un concept caméléon, même si j’ai tenté, moi aussi, d’en comprendre l’essence malgré sa polysémie.
CC : Quelle est l’importance de l’histoire de la danse pour l’art de la danse?
MF : Je tiens à dire que je ne me considère pas comme une historienne de la danse, au sens classique du terme, même si plusieurs me qualifient ainsi, ou alors j’en fais comme Monsieur Jourdain faisait de la prose sans le savoir! L’historienne dans notre département, c’était Iro Tembeck, l’histoire était au cœur de sa recherche, par ses sujets et sa méthodologie. Par contre, je fais de l’histoire ma nourriture, tout comme je ne peux pas passer à côté de la philosophie. Je pense aussi qu’un chorégraphe ou un artiste sérieux, ne peut faire fi de l’histoire de sa discipline, non plus que de l’histoire de l’art et de l’histoire en général. C’est un peu un poncif de dire ça.
Moi, mes grandes sources de réflexion ont été entre autres les philosophes français, notamment Gilles Deleuze que j’ai découvert dans les années 80. La logique du sens et son étude sur Francis Bacon, La logique de la sensation, de même que ses études sur le cinéma ont été des ouvrages qui ont transformé ma compréhension et mon appréhension de la danse.
Même si ce qui m’intéresse ce sont les questions d’esthétique, les passages vers d’autres champs sont salutaires à la connaissance, ils provoquent un déséquilibre de la pensée, font entrevoir autrement une réalité à laquelle on s’est habitué. D’ailleurs philosophie, histoire, esthétique voire anthropologie investissent souvent les mêmes territoires, se chevauchent souvent et se nourrissent mutuellement.
CC : Est-ce que l’esthétique est un concept philosophique ou la pratique de la danse?
MF. C’est un peu complexe. Le champ de l’esthétique, ou philosophie de l’art, comprend les différentes théories de l’art qui se sont développées surtout depuis le 18 è siècle à partir des théories du Beau, de l’expérience et de la perception esthétiques, mais aussi la réflexion sur les pratiques artistiques et leur analyse, peut-être ce que les anglo-saxons désignent sous le terme criticism.
CC : Est-ce que vous écrivez avec votre corps?
MF : J’écris avec la totalité de ce que je suis. Cela veut dire que je suis ex-danseuse, avec une expérience sensorielle, intellectuelle, cognitive, etc., qui fait que je suis qui je suis. Quand je regarde un spectacle, j’essaye de faire comme le bon phénoménologue, de mettre mon jugement entre parenthèses, mais j’observe et je pense la danse en assumant ma subjectivité. C’est aussi ça qui fonde l’originalité d’une pensée, je crois. La sensibilité au mouvement m’habite, et cette aptitude fait que je ne pense peut-être pas comme quelqu’un qui n’a jamais dansé. C’est bien clair.
CC : J’aime énormément votre écriture, elle m’a aidée quand j’ai fait ma maîtrise.
MF : Merci, ça me fait plaisir que ça serve à quelqu’un.
CC : En lisant vos textes des années 80, il me semble qu’ils sont très avant-gardistes. Est-ce que le travail académique francophone est précurseur du travail académique anglophone?
MF : Je n’ai jamais pensé ça. Je faisais mes recherches pendant la période fortement influencée par les pensées sémiotique de Roland Barthes, post-structuraliste et déconstructionniste de Gilles Deleuze, de Jacques Derrida, Jean Baudrillard. En France, tous ceux qui réfléchissaient sur l’art se sont emparés de leurs approches et de leurs concepts. C’est vrai que ça arrive en décalage aux États-Unis, ou dans le milieu anglophone, encore que Susan Foster se soit également réclamée de Barthes dans certains de ses écrits des années 80. Le monde académique anglophone de la danse n’avait pas ces préoccupations-là, mais développait le champ des cultural studies, Bourdieu et Foucault à l’appui. Quant à la phénoménologie, presque disparue du paysage universitaire, elle fait retour aujourd’hui, je pense à Sondra Fraleigh, à Aurore Després.
Ce qui est frappant ces dernières années, c’est que nombre de praticiens revendiquent la pensée de philosophes. La notion deleuzienne de rhizome, par exemple, a fait fortune, elle fait partie de ces concepts métaphores qui sortent de leur territoire philosophique pour alimenter tant la réflexion sur les arts que la création elle-même.
CC : Pour quelles raisons est-ce que le monde académique anglophone était en retard par rapport au monde francophone?
MF : Vous dites retard, mais je ne pense pas qu’on puisse porter un tel jugement. C’est plus une question de culture et d’intérêts différents à un moment donné. Si retard, il y avait, je dirais davantage que c’est la recherche en danse en général qui en accusait un par rapport à d’autres champs artistiques, parce qu’elle était bien peu présente dans les universités et quasiment absente dans celles de la francophonie jusqu’à tout récemment. Par contre, il me semble qu’on réfléchit beaucoup autour de la danse et peu sur la danse en tant qu’art.
CC : Sur quoi travaillez-vous maintenant?
MF : J’ai passé la journée d’hier à la Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ). Je refouillais dans les archives de Jean-Pierre Perreault, pour essayer d’alimenter le travail de la Fondation Jean-Pierre Perreault sur la préservation du patrimoine chorégraphique et j’ai un plaisir fou à faire ça.
J’ai également au four la co-direction d’un dossier sur la danse dans une revue spécialisée, mais je n’ai pas de gros projet en cours.
CC : Pourriez-vous m’expliquer comment le concept de la mémoire du corps est-il relié au projet de reconstruction chorégraphique de la Fondation Jean-Pierre Perreault?
MF : Mémoire du corps, tout le monde parle de ça, mais je ne sais pas trop bien ce que le terme recouvre même si je l’utilise paresseusement moi-même. En ce qui concerne le projet Perreault, Ginelle Chagnon a remonté des pièces de Jean-Pierre en faisant appel à leur ancrage dans les corps des interprètes qui l’ont assistée, leurs circuits neuronaux, leur affectivité, bref l’ensemble de leur expérience de l’œuvre et de l’homme alimenté par les vidéos, des notes etc. Les vidéos sont les témoins d’une seule fois, Christine Charles, n’est pas Ginelle ; Lucie Boissinot n’est pas Christine Charles… Tout se joue dans une intersubjectivité et dans un présent.
CC : Si vous pouviez retourner à une autre époque pour pratiquer ou observer un style de danse, vous retourneriez à quel endroit et à quelle époque?
MF : Moi, je suis totalement d’aujourd’hui. J’adore, j’ai un plaisir fou à regarder ce qui se passe. J’ai une curiosité qui ne s’est pas démentie et je vois toujours beaucoup de spectacles ici ou à l’étranger, et pas seulement de danse. La jeune génération qui est en train de se développer, qui sort des écoles et des universités, je la regarde aller et je suis fascinée par ce qu’elle propose, son souci d’aller vers le public, ses formules nouvelles d’organisation et d’engagement. Je crois qu’il y a vraiment là une dynamique qui est en marche et que l’on avait un petit peu perdue ces dernières années. Non, je n’ai pas de nostalgie, mais ça ne m’empêche pas de lire sur les événements du passé, même si je ne suis pas une passionnée des Ballets Russes ou de la danse de Louis XIV. J’ai envie par exemple de réfléchir sur une sorte de pornographie ironique ou burlesque dans la danse d’aujourd’hui. Je m’interroge sur le travail de Dave St-Pierre. Sa dernière pièce, que je n’ai pas encore vue, s’appelle « What’s Next ».
Je dis oui, effectivement, « what’s next »?
CC : Avez-vous d’autres commentaires que vous aimeriez partager?
Oui, je pense que ma contribution la plus pertinente s’est faite à travers mon enseignement et dans le développement des programmes que nous avons mis sur pied à l’UQAM. En 1979, aucun programme universitaire de danse n’existait en francophonie, il nous a fallu l’inventer à partir de nos propres expériences disparates. Beaucoup d’énergie et beaucoup de temps. C’est bon parfois de rappeler le chemin parcouru.
Mon plus grand plaisir : me retrouver dans un studio de danse avec des chorégraphes et danseurs en phase de création.
ENGLISH ABSTRACT
Michèle Febvre is a dance scholar based in Montreal, Quebec. She studied physical education in France before moving to Quebec City to teach mime and expressive dance at Laval University. In the 1970s, she began dancing professionally with the newly created Groupe Nouvelle Aire, where she helped shape early Quebecois modern dance. Febvre completed a doctorate with the University of Paris VIII. Her graduate research focussed on the concept of theatricality in contemporary dance. Febvre is an interdisciplinary thinker; she draws upon her intimate knowledge of philosophy, history and dancing to critique current dance practice. Her scholarly work provides a unique perspective on dance, in part due to her European education, which familiarized her with post-modern philosophy at its inception. Febvre’s long-standing reflection on post-modern thought and aesthetics provides insight into themes that are currently central to English-language performance scholarship
PUBLICATIONS ETC.
- Anatomie du vertige : Ginette Laurin: 20 ans de création, par Michèle Febvre
- Jean-Pierre Perreault: regard pluriel, par Michèle Febvre
- Elle est actuellement professeure associée, et, à ce titre, elle participe aux travaux du groupe de recherche « Performativité et effets de présence » (UQAM)
PERSONNEL
Miriam Adams, C.M.
Co-founder/Advisor
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